Project Valkyrie

(Awwwww Mickaël trop chou.)

Il cligna des yeux d'un air étonné quand il mentionna les cinq à huit heures habituelles, et hésita l'espace d'une seconde avant de se lancer :
- Mais après six heures, est-ce que ça peut vraiment compter pour de l'insomnie ? Je pensais qu'on disait insomniaque quelqu'un qui aurait moins de cinq heures quotidiennement, se justifia-t-il.
La porte s'ouvrit à grand bruit, et il dut retenir un sursautement. Quatre sous-gradés accompagnés de deux soldats plus professionnels, lesquels s'arrêtèrent à la porte, disposèrent bols et cuillères avant de déposer un autre plat lourd, cette fois rempli... de porridge.
Ah.

Mickaël fronça les sourcils, réfléchissant à la question d'Andrei avant de juste hausser les épaules.
- Bah j'sais pas vraiment en fait, je dors juste mal.
L'arrivé des quatre sous-gradés eut le mérite d'attirer un temps soit peu l'attention du polonais.
Attention qui se transforma bien vite en déception.
Déception qui vient d'ailleurs se calquer sur les traits d'Abel qui regarda le petit déjeuné avec un air hésitant entre la tristesse et la concertation.
Et si hier Mickaël aurait donné n'importe quoi pour de la viande, aurait c'est pour du café qu'il aurait arraché la tête de quelqu'un.
Non mais sérieusement. Du porridge. C'était ... Décevant.

- Même pas de café ou de thé, grommela tout bas Andreï en se rapprochant de la table pour se servir rapidement. Trois louchées de la sorte de bouille d'avoine grumeleuse, et rien d'autre.
Quoique, il réalisa à la première bouchée que le cuisinier avait poussé la gentillesse jusqu'à ajouter un peu de sel dans sa mixture. La texture était désagréable, mais c'était chaud et c'était mangeable, se dit-il en mastiquant par dépit.

Plus ou moins comme un zombie, Mickaël suivit Andrei et se servit quelques cuillères de porridge avant de revenir s'assoir à table et de commencer à manger avec le regard dans le vague. Abel les rejoignit peu après et mit un petit temps à commencer à manger, comme dégouté par ce qui se trouvait dans son assiette. Même si c'était mangeable, il aurait largement préféré quelque chose d'autre. Comme tout le monde ici.
- Qu'est-ce qu'il va se passer aujourd'hui à votre avis ? Demanda l'allemand en regardant tour à tour Andrei puis Mickaël.

Tout en terminant sa bouchée, le russe réfléchit pendant un moment.
- Difficile à savoir, admit-il. Mais nous risquons de passer plus de tests dans les prochains jours si nous sommes réellement pris comme cobayes.
Quant à la nature des tests qu'ils pourraient passer, ça, il ne saurait certainement pas dire. Il espérait seulement qu'ils n'en souffriraient pas trop, pas jusqu'à ce qu'il trouve une porte de sortie potentielle.

Abel fronça les sourcils et se força à avaler sa bouchée avant de parler.
- Des cobayes ? Ça sonne vraiment pas rassurant.
Surtout qu'à sa grande honte - et même s'il ne l'avouerait jamais - Abel était plutôt douillet par rapport à tout ce qui avait un rapport de près ou de loin avec la médecine. Les piqures, les opérations, les points de suture, tout ça le mettait mal à l'aise sans qu'il comprenne vraiment pourquoi.

Andreï haussa les épaules.
- Je vois pas d'autre explication possible à notre présence ici.. A moins qu'ils ne veulent nous rééduquer et nous nazifier, mais ça n'aurait aucun sens de le faire à petite échelle, à moins que cela ne soit une expérimentation quelconque.
Il finit son bol de porridge tranquillement et regarda leurs geôliers discuter à voix basse, à une dizaine de mètres d'eux.
- Quoiqu'il en soit, on devrait essayer de trouver un moyen de partir d'ici tant qu'on le peut, termina-t-il en polonais discrètement, avec un geste d'excuse envers Abel.
Trop imprudent de parler allemand devant des nazis.

Abel baissa les yeux et finit à contre-coeur son porridge, inquiet et pas très rassuré sur ce que la journée leur annonçait.
Mickaël quant à lui, maintenant un peu plus réveillé grâce à la nourriture, s'étira en baillant de nouveau avant de simplement faire un signe de tête à Andrei pour lui signifier qu'il avait compris. Même si s'échapper risquait d'être difficile, ça ne serait pas impossible. Ca ne pouvait pas être impossible.

En réponse, Andreï lui sourit avant de se frotter une paupière, posant le bout des coudes sur la table de bois grossier et fermant les yeux à moitié. Peut-être était-ce le froid de la pièce, mais il se sentait anormalement endormi...
Enfin, il se sentirait mieux dans quelques minutes, sans doute. Il étouffa un bâillement et se figea en croyant reconnaître une figure bien connue.
Leonhard... ?

Dusan ne savait pas encore trop quoi penser de sa situation, et c'était cette indécision qui lui déplaisait.
D'un côté, il échappait à son travail de forçat à l'usine métallurgique pour une plus longue période, et ce ne pouvait être qu'une bonne chose. De l'autre, ce voyage à Berlin financé par son supérieur avait vraiment échappé à son contrôle.
Enfin.
Il se resservit une louchée de porridge et se remit à manger. Toujours profiter des plats en vrac, même lorsqu'ils étaient mauvais.

Leonhard ne savait pas pourquoi on l'avait amené ici. Et c'était presque dérangeant en fait. Après tout il s'était résigné à se faire exécuter, mais manifestement, ce qu'on lui réservait avait changé. Pas que rester en vie plus longtemps le dérange, au contraire. Mais se retrouver sous la tutelle de médecins, et d'autres soldats, après tellement de mois à être un SS gradé lui faisait ... Bizarre. Et lui déplaisait.
Il fut emmené dans une vaste salle, et par réflexe, il parcourut rapidement des yeux chacune des personnes.
Pourtant son regard s'arrêta précisément sur Andrei - enfin pour lui Kay.
L'ex-SS fronça les sourcils et se rapprocha d'un pas, pour s'assurer que ce qu'il voyait était vraiment son ancien collègue.
Mais pas de doute, c'était bien lui.
Lui et sa trop belle gueule d'ailleurs.
- Kay ! Qu'est-ce que tu fais ici ? T'étais pas sensé être mort ?

Andreï retint une petite grimace en l'entendant l'appeler et soupira discrètement - eh voilà, c'était parti pour quelques petites explications envers sa tablée.
Mais d'abord, se charger du nazi. Règle numéro un du bon espion soviétique : Toujours se charger du nazi.
- Leonhard.
Sa voix était quelque peu moins enthousiaste, et il dût lever la tête pour le regarder en fronçant les sourcils.
- Je pourrais te demander la même chose... Le climat de Dachau ne t'allait plus ? demanda-t-il en croisant les bras.
La prochaine étape serait qu'il lui demande pourquoi au juste il avait changé de couleur de cheveux, et il n'y ressentait aucun plaisir à la perspective de devoir s'avouer espion devant un ancien "collègue" qu'il avait mis dans le pétrin et des connaissances toutes neuves.
Enfin, s'ils n'arrivaient pas à sortir d'ici, ils ne pourraient pas compromettre son futur d'espion, songea-t-il.

Non décidément, c'était bien le Kay qu'il connaissait. Même voix, même façon de prononcer son nom. Aussi, Leonhard se retint de lever les yeux au ciel à la mention de Dachau et se contenta de sourire, de son fameux sourire qui le rajeunissait et le faisait paraître plus ... "Gentil" qu'il n'était réellement.
- Aussi étonnant que ça puisse paraître, non, le climat de Dachau ne me plaisait pas. Et il m'a encore moins plu quand l'explosion a eu lieu et que tu as disparu. Tu pourrais m'expliquer, Kay ?

Abel, et surtout Mickaël, regardait sans comprendre Leonhard, puis Andrei - ou Kay. Pour le moins confus et perdus.

Et voilà qu'il enfonçait le clou en plus, ce sacré enculé. Il aurait été en colère si Leonhard ne s'était pas muni de son fameux sourire - trop chaleureux pour le visage d'un Allemand, pensait-il toujours -.
- Ah, ils t'ont soupçonné à ma place ?
Il dut retenir un sourire et surveilla du coin de l'œil les deux gardes, qui semblaient occupés à parler. Des nazis bavards ? On en apprenait tous les jours.
Il se reconcentra sur lui.
- Expliquer quoi ? Tu as déjà tout saisi. Oui, j'ai saboté l'aile cinq et le hangar quatre de Dachau et non, Kay n'est pas mon vrai nom. Et oui, j'étais venu en but de faire exploser ce sacré camp de mes deux.
Il se tourna vers Abel et Mickaël, lesquels les deux avaient l'air de plus en plus perdus. Quand à Irina, elle se contentait de le regarder d'un regard de chat, à savoir "eh voilà, il est cinglé".
- Abel, Mickaël, Irina, je vous présente Leonhard, fit-il comme si rien ne s'était passé. Il était un SS haut-gradé, un des commandants des sections du camp de concentration de Dachau, bref, un Nazi.

Il était ... Brutalement honnête. Et c'était plutôt surprenant. Même si ça évitait à Leonhard une série de questions qui aurait de toute façon aboutit à ces réponses. Malgré tout sa description le vexa plus ou moins. Il n'était pas "qu'un" nazi. Kay - enfin, plus Kay du coup - était toujours un salaud ça n'avait pas changé. Et le fait d'avoir été accusé à sa place le rendait ... Bizarrement mauvais joueur. Mais au final ils avaient tous les deux atterrit ici, alors ça ne devait pas changer grand chose.
Aussi il conclut de l'espion par une petite révérence ironique, mais bien faite, étrangement. Il regarda une dernière fois les trois autres personnes qui mangeaient à la table de son ancien collègue et finit par s'éloigner pour aller se chercher à manger et trouver une place. Il ne tirerait rien de plus de lui maintenant, pas alors qu'il était entouré de ... Son harem disons.

Quand Leonhard se fut éloigné, Mickaël ne put s'empêcher de tapoter l'épaule d'Andrei pour attirer son attention.
- Attends, j'suis pas sûr d'avoir tout compris. T'étais un espion du coup ? Mais pour qui exactement ? Et ... Tu t'appelles comment du coup ? Andrei ou ... Kay ?

Paradoxalement, voir Leonhard prendre son congé sans chercher à se défendre le déçut. La vérité était qu'il aimait particuluèrement le faire sortir de ses gonds, peut-être à cause de son perpétuel professionnalisme qui le rendait tout autant irritant qu'attachant.
Bref, quand Mickaël lui tapota l'épaule, il dut retenir un sursautement.
- Hm... En somme oui, c'est ça. Et j'offrais mes informations au plus offrant, dit-il vaguement en haussant les épaules. L'URSS me dégoûte trop pour y être "fidèle", alors je faisais du double espionnage, jusqu'à ce qu'on me signale.
Il marqua une pause. Il se doutait bien du - ou plutôt, de la - responsable... Wilhelmina.
Et il l'avait mérité.
- Kay n'était qu'un alias pour ma mission à Dachau, finit-il en haussant les épaules. Andrei ira.

La vision d'une silhouette, perçue du coin de l'œil, le fit tourner la tête discrètement. Quand il put mieux voir la personne qui s'approchait de sa table, il dut retenir un petit sourire approbateur. Les lunettes, la coiffure... Tout semblait harmonieux chez ce nouvel homme, ne put-il s'empêcher de remarquer. (Et ses larges épaules feraient un excellent support une fois à l'horizontale).
- Vous cherchez une table ? demanda-t-il en souriant, en allemand. Vous pouvez vous asseoir ici, y'a de la place.
N'ayant pas entendu un traître mot de la discrète confrontation d'à côté, il ne pouvait percevoir Leonhard que d'un bon œil. Après tout, un Allemand qui se retrouvait parmi des criminels ne pouvait qu'avoir trahi l'Allemagne nazie.

Mickaël hocha la tête, cherchant à digérer cette nouveauté. Pas que le passé d'Andrei allait changer quelque chose, mais après tout, de ce qu'il avait vaguement entendu dans les douches, chacun avait au moins fait une infraction à la loi pour se retrouver ici. Et se côtoyait des meurtriers, des voleurs comme lui, et des espions, comme Andrei. N'empêche, comme un gamin intrigué par la nouveauté il avait vraiment envie de lui poser des questions. Est-ce que c'était si dur que ça d'être espion, de se faire passer pour ce qu'il n'était pas.
Mais c'était encore trop tôt pour les questions ; alors il se contenta de lui sourire.
- O-Kay, va pour pour Andrei.
Il n'avait pas pu s'en empêcher, avec un faux nom comme ça, c'était trop tentant.

La vision du porridge suffit à Leonhard pour immédiatement détester cette endroit. A la limite il pouvait supporter la promiscuité des autres cobayes, l'humiliation d'être de nouveau sous la tutelle de moins gradé que lui, mais ce ... Ce truc qui leur servait de déjeuné lui retournait l'estomac. Il allait le manger, bien sûr - après avoir travailler dans un camp de concentration, il savait ce que le manque de nourriture faisait au corps humain - et il n'était pas assez stupide pour se laisser mourir de faim. Mais tout de même.
Aussi, quand il entendit une voix l'interpeller, il en fut surpris.
Et sa surprise fut des plus agréables quand ses yeux se posèrent sur le blondinet qui lui avait proposé une place.
L'ex-SS se dirigea donc vers lui et posa son assiette sur la table.
- Merci, c'est gentil de m'avoir proposé une place, dit-il avec un petit sourire en détaillant avec curiosité son vis-à-vis.

En entendant son jeu de mot, il ne put retenir un léger rire.
- J'ai choisi ce prénom pour la blague, justement, fit-il en souriant. Quand j'ai vu que les Allemands avaient "Kay" parmi les plus populaires... Je n'ai pas pu résister.
Andreï se rappelait chaleureusement de l'un de ses collègues, avec qui ils jouaient à trouver le nom le plus absurde possible. Pour une mission en Tchétchénie, il avait suggéré l'identité de "Suka Bliatt". "Putain de merde", en russe.
Evidemment, leur supérieur ne les laissait pas les utiliser.

- C'est normal, répondit Dusan avec un léger sourire.
Avant de travailler dans les mines, il avait été interprète. Il ne pouvait pas s'empêcher de regretter ces temps passés à interagir et à aider les gens plutôt que de rester coincé dans une sordide cave minières la moitié de la journée.
Il soutint son regard tandis qu'il s'asseyait à ses côtés, et tendit la main pour la lui serrer.
- Je m'appelle Dusan. Et vous ?
Toujours utiliser le Sie formel avec les Allemands... Les bons souvenirs remontaient.

Le polonais ne put s'empêcher d'hausser les sourcils sous la surprise en l'entendant rire pour la première fois. A vrai dire, c'était un son agréable. Très agréable. Il lui sourit en retour lui tapa amicalement l'épaule.
- T'es un vrai gamin toi, on dirait pas comme ça hein, mais Kay, quand même ... C'est bien trouvé ! Les allemands sont bizarres quand même, Kay, comme prénom le plus populaire ...
Il lança un regard amusé à Abel qui ne comprit pas - déjà que l'échange entre Andrei et Mickaël lui échappait en grande partie, il ne sut pas interpréter ce sourire et fronça juste les sourcils avec un air perplexe. Il détestait ne pas comprendre, et ne pas réussir à communiquer avec ceux qui formait plus ou moins son groupe allait vite l'agacer.

L'ex-SS lui serra la main en retour, appréciant sans se l'avouer ce bref contact physique.
- Leonhard.
Il hésita quelques instants à poser la question, mais les gardes qui l'avait amené ici, le secret qui semblait entouré cette endroit et les différentes salles - toutes plus bizarres les unes que les autres - piquait sa curiosité.
- Pourquoi est-ce que nous avons été emmené ici ? J'ai passé un examen médicale avant d'être amené dans la salle, je suppose que toi aussi. Mais je ne comprends pas ce qu'ils veulent.

Andreï eut un léger sourire et secoua la tête.
- Hans et Klaus étaient les préférés depuis quelques années, mais on ne peut rien faire avec des prénoms de la sorte. Et peut-être que c'est mon côté russe, mais j'aime mieux les prénoms avec un y...
Suivant le regard de Mickaël, il réalisa en voyant la figure perplexe et frustrée d'Abel que depuis le départ de Leonhard, leur échange était revenu au russe et non à l'allemand.
- Désolé, dit-il envers le jeune Allemand. Si tu veux, je peux essayer de t'apprendre le russe ?

Leonhard... C'était un prénom qui lui allait bien, c'était le moindre qu'on puisse dire. Dusan lui sourit davantage et lâcha sa main - une main ferme et chaude, à la peau douce pour un homme - comme à regret.
- Hm... C'est difficile à savoir. Je penche pour une sorte de camp de rééducation/réinsertion, mais dans ce cas ça ne fait pas sens qu'ils acceptent des étrangers comme moi ou d'autres que j'ai vu... Je viens de la Yougoslavie, précisa-t-il avec un léger sourire.

Abel ne put réprimer un air surpris et il mit un petit temps avant d'hocher la tête.
- Oh ouais, ça ... Ça serait vraiment gentil de ta part.
Il n'aurait pas parié sur l'aide d'Andrei, et il se voyait déjà galérer à comprendre chaque mot. Mais manifestement il avait jugé trop vite, et il en était soulagé. Ca le rassurait même de savoir qu'il pourrait communiquer plus facilement avec les autres, vu que l'allemand avait l'air d'être une langue minoritaire dans le groupe.

Leonhard réfléchit quelques instants. Même de son post de SS il n'avait jamais entendu parlé d'un camp de réinsertion. La plupart du temps, le Reich éliminait les ennemis, il ne cherchait pas à les rééduquer. Aussi, le rassemblement de différent nationalité le laissait perplexe.
- Yougoslave, hein ... Marmonna-t-il en regardant le visage de Dusan.
Il n'aurait pas parié sur cette nationalité - il aurait tout aussi bien pu être allemand ou ... Français. Mais Yougoslave, au final, ça lui allait très bien. C'était ... Exotique.
- Et t'as une idée du point commun qui a rassemblé tout le monde ici ?

Il lui sourit en réponse. D'après ce qu'il avait vu jusque-là, Abel lui rappelait un peu comment il était, adolescent. Il savait bien que si on l'avait aidé à cette époque -là, il serait peut-être devenu quelqu'un de meilleur.
Mais on ne pouvait pas changer le passé.
- Okay, on peut commencer avec les basiques : Bonjour est привет, on prononce pri-vyet. Merci, спасибо -on dit spasibo...
Une alarme retentit bruyamment et il se retint de lever les yeux au ciel. Cette sensation de redevenir une nouvelle recrue à un camp militaire devenait extrêmement chiante.
- Fin du repas, annonça une voix à travers les hauts parleurs.
La porte s'ouvrit quelques secondes plus tard, et deux gardes en uniforme surgirent.
- Tout le monde, vous venez.
Allemand et russe furent répétés, et Andreï se leva, curieux malgré lui. Plus de tests ou peut-être autre chose ?

Dusan haussa les épaules, peu habitué à se faire regarder de la sorte. Chez lui, il était assez typique pour ne pas se faire remarquer.
- Hum... D'après ce que j'ai entendu, nous étions tous destinés à finir en prison alors oui, on est tous criminels. Pas forcément de la pire espèce, la plupart ont volé ou se sont opposés aux autorités, des trucs du genre...
L'ordre soudain, lequel annonçait la fin de leur petit-déjeuner, lui fit faire une petite moue.
- Enfin, on verra bien ce qu'ils nous veulent !

Abel s'était penché par réflexe vers Andrei pour mieux l'entendre, et il s'apprêtait à répéter les mots quand l'alarme se déclencha. Un soupir lui échappa et il fit comme tous le monde et suivit le mouvement, inquiet et curieux à la fois.

Leonhard hocha vaguement la tête, prenant conscience que tant que seul Andrei et son harem saurait son ancien métier, il n'aurait rien à craindre des prisonniers rassemblés ici. Alors autant faire semblant d'être un simple criminel, et pas un SS.
La sonnerie le fit sursauter et il fronça les sourcils ; il avait à peine eut le temps de manger, et devoir se rassembler comme des bons toutous le faisait chier. Mais ne désirant pas se prendre une balle en pleine tête dès le premier jour il se leva avec Dusan et rejoignit la masse attroupé devant la porte, attendant les prochaines instructions.

(Mawww Abel.)

Entourés de gardes armés, ils traversèrent deux couloirs et prirent un tournant avant d'arriver à une petite salle fraîche, à l'hygiène irréprochable. Deux médecins, assis sur des tabourets a côté de chaises, semblaient attendre : Irina remarqua tout de suite la longue seringue qu'ils tenaient chacun à la main.
- Nous effectuerons une prise de sang obligatoire, annonça l'un des gardes. Mettez-vous en rang. Et plus vite que ça !
Andreï se dirigea docilement vers le deuxième médecin et s'asseya le premier sur la chaise de faux cuir. L'odeur clinique, ou quelque chose dans l'air... le mettait mal à l'aise. Une prise de sang ? Serait-ce pour vérifier leur santé ?


Dusan, lui, se dirigea vers la gauche. Il était le troisième, derrière une jeune femme et une personne qu'il n'avait pas remarquée auparavant.
- C'est quand même bizarre, tout ça, murmura-t-il en russe vers Leonhard. A quoi servirait un-
- Silence ! intima un garde derrière lui, le poussant du bout de son fusil.
Connard. S'il avait été libre, il lui aurait donné un bon coup de poing. A la place, il roula des yeux discrètement et croisa les bras en attendant.

Abel, plus petit que la plupart des autres cobayes, se mit pencha hors de la file pour voir ce que les médecins leur réservait. La vue de la longue - trop longue - seringue le fit pâlir visiblement. Il y avait échappé hier, il n'y échapperait pas aujourd'hui, les gardes armés l'en dissuadèrent. Le jeune allemand tourna la tête à droite et à gauche, à la recherche d'Irina, Mickaël et Andrei, lequel était déjà assis devant le médecin, prêt à subir sa prise de sang. Sûrement que ce geste de chercher du regard le trio qu'il suivait allait devenir un réflexe.

Leonhard faillit lui répondre, mais la reprise brutale du garde le surprire et il décida de ne rien dire, mais hocha simplement la tête. C'était effectivement bizarre. Et ça ne lui plaisait pas du tout. Mais au moins, la promiscuité lui permettait de mieux observer les autres cobayes, et il tenta de graver leur visage dans sa mémoire, sait-on jamais, ça peut servir.

Andreï, du coin de l'œil, prêta attention aux gestes du médecin. Et.... est-ce que la seringue avait quelque chose à l'intérieur... ?
- Votre bras, s'il vous plaît, rappela le médecin.
Il étendit son bras sans pouvoir s'empêcher de se sentir nerveux. Qu'est-ce qu'ils allaient lui injecter ?
La sensation légère mais dérangeante de l'aiguille entrant dans sa peau le fit soupirer légèrement. Trop tard pour y échapper maintenant.
Il observa tandis que son sang remontait le tube de verre de la seringue. Le faisaient-ils pour cacher le produit qu'ils leur inoculaient ?

Irina, juste devant Abel, sentit sa nervosité et lui donna un petit coup de coude pour lui sourire.
- Ca ira, murmura-t-elle sur un ton rassurant.
En voyant le regard noir du soldat devant eux, elle se tut rapidement et haussa les épaules envers Abel, dans un geste universel "quel est le pire qui pourrait arriver ?" Quel dommage que la barrière de la langue lui empêche d'être plus bavarde.
Enfin, ça et ces satanés hommes en uniforme.